« Et la femme créa Hollywood » mardi 11 février à 20h30
A l’occasion de la soirée de l’assemblée générale au Palais des Congrès, salle de l’auditorium, Rochefort sur Toile vous propose de découvrir le film
« Et la femme créa Hollywood »
Documentaire – 52 minutes produit et réalisé par Julia Kuperberg et Clara Kuperberg Wichita Films avec la participation d’OCS
Les soeurs Kuperberg, réalisatrices et productrices, se sont spécialisées depuis dix ans et près de 40 documentaires, dans la culture et l’histoire américaines à travers des films aussi éclectiques que : « Milos Forman, un outsider à Hollywood », « Hollywood et les Hommes », « Los Angeles cité du film noir », « Steve Schapiro et les icônes américaines… », « This is Orson Welles » sélectionné au dernier Festival de Cannes (Cannes Classics).
CES FEMMES PIONNIÈRES OUBLIEES DU CINEMA
Le premier film parlant a été réalisé par Alice Guy Blaché, le premier en couleurs a été produit par Lois Weber qui a réalisé plus de 300 films en dix ans, Frances Marion était la scénariste de la star Mary Pickford, qui gagna deux Oscars du meilleur scénario,
Dorothy Arzner fut la réalisatrice la plus puissante d’Hollywood, et leur point commun ? Ce sont toutes des femmes et elles ont toutes été oubliées.
Aussi incroyable que cela puisse paraître, il aura fallu attendre 2010 et Kathryn Bigelow pour qu’une femme soit récompensée aux Oscars dans la catégorie Meilleure Réalisation ! En recevant la fameuse statuette dorée, la réalisatrice de Démineurs est devenue la toute première femme à recevoir cette récompense depuis la création du prix en 1929. Ni Sofia Coppola pour Lost in Translation, ni Jane Campion pour La leçon de piano, entre autres, n’ont eu droit à cet honneur en 81 ans de remise de trophées. Si elles sont sous-représentées, les femmes ont pourtant toujours fait partie de l’Histoire du 7e Art.
« C’est cette partie de l’histoire souvent passée sous silence que le documentaire propose de raconter »
Tout commence au début des années 10, les Juifs et les femmes sont interdits de travail dans de nombreuses branches aux Etats- Unis ; en revanche, le milieu « artistique » leur est ouvert. Il est considéré, au début du 20e siècle, comme un art mineur et peu lucratif, de nombreuses femmes partent sur la côte Ouest pour devenir scénaristes, actrices mais aussi réalisatrices dans un Hollywood qui n’a même pas encore ses lettres blanches.
C’est en 1986 que cette histoire oubliée va resurgir grâce à la réalisatrice Ally Acker. La jeune femme tombe sur des archives des Oscars et en sort des clichés de femmes derrière la caméra sur des plateaux de cinéma datant des années 10. Qui sont ces femmes dont personne n’a jamais entendu parler ? Des noms émergent : Lois Weber, Frances Marion, Dorothy Arzner, Alice Guy, Mabel Normand, Cleo Madison… et tant d’autres tombées aux oubliettes de l’histoire du cinéma.
Mais aujourd’hui qui se souvient que le premier studio de cinéma a été créé par une secrétaire française de la Gaumont, venue aux États-Unis pour devenir réalisatrice ? Que Mabel Normand a appris à Charlie Chaplin à écrire des sketchs comiques ? Qu’Alice Guy a réalisé le premier film narratif quelques mois avant Méliès ?
Que Frances Marion a été la plus grande scénariste américaine, avec plus de 300 films à son actif et 2 Oscars ? Que Lois Weber était tellement puissante à cette époque que Carl Laemmle, grand patron d’Universal Studios la nomma « Maire d’Universal » tant elle était prolifique et puissante au sein de l’industrie ? Ou que l’un de ses premiers films Hypocrites montre pour la première fois une femme nue et provoquera des émeutes à New York et dans tous les États-Unis ? Ou encore qui sait que la première femme productrice qui crée le plus grand studio indépendant United Artists n’est autre que la star du muet Mary Pickford ?
Non seulement personne ne s’en souvient, mais personne ne le sait vraiment non plus.
Ces femmes ont tout bonnement disparu des livres d’histoires pendant plus d’un siècle. Car comme nous le dit avec une pointe de provocation Ally Acker : « L’Histoire est écrite par les vainqueurs et dans cette histoire, ce fut les hommes. »
Renvoyées du jour au lendemain des studios qu’elles avaient quasiment construits de leurs mains, ces femmes ont créé Hollywood et le langage cinématographique avant d’être « oubliées » du 7e Art et de l’histoire en général.
La Grande Dépression frappe alors l’Amérique et pousse les hommes ruinés de la côte Est à partir à l’Ouest pour trouver du travail, ils découvrent alors le potentiel financier que pouvait devenir Hollywood et s’y installent. Aidés de la syndicalisation naissante d’Hollywood, ils ont poussé vers la sortie ces femmes de pouvoir pour prendre leur place. Elles se retrouvent à devoir leur servir de « professeurs » ou d’aides sur les tournages !
Des années 30 jusqu’aux années 80, on ne compte plus que 2 femmes réalisatrices à
Hollywood ! Dorothy Arzner et Ida Lupino…
Il faudra attendre les années 80, pour voir une deuxième vague de « pionnières », sorties tout droit des universités reprendre le flambeau. Paula Wagner qui crée la compagnie de production Cruise-Wagner avec Tom Cruise est l’une des premières femmes à produire des blockbusters comme les Mission Impossible, Sherry Lansing devient la première femme à diriger un studio moderne à Hollywood, Paramount puis Fox… Une nouvelle vague de femmes réalisatrices voit également le jour à cette époque ; Nora Ephron, Susan Seidelman, jusqu’à Jodie Foster et Sofia Coppola. Et pourtant, le constat reste sévère : elles sont une poignée derrière la caméra.
Lynda Obst productrice chez Sony et entre autres de Flashdance, Fisher King, Nuits Blanches à Seattle, Cari Beauchamp historienne spécialisée de l’histoire des femmes ou encore Robin Swicord, scénariste oscarisée de Benjamin Button et Mémoire d’une Geisha, reviennent sur l’histoire de ces femmes et sur leur situation à Hollywood encore aujourd’hui.
Si c’est un thème qui traverse l’histoire du cinéma, il fait particulièrement écho à l’actualité du moment et notamment à la lutte pour l’égalité des salaires qui secoue Hollywood, quand il y a quelques temps, Jennifer Lawrence pointait toujours et encore les inégalités, près de 80 ans après leurs aînées oubliées.